Au tournant du 20e siècle, Montréal fait face à des enjeux de salubrité et d’hygiène : peu de ménage a accès à des bains ou même l’eau courante, et les installations de baignade publique dans le fleuve ne sont plus sanitaires en raison des déversements des égouts.
C’est dans ce contexte que dans les années 1910, les autorités municipales entreprennent la construction de plusieurs bains, comme les bains Émard, Saint-Denis et Turcot notamment. Une autre vague de construction a lieu dans les années 1930, dans le cadre des travaux publics pour les chômeurs.
Dans les années 1940, la généralisation installations sanitaires dans les appartements amène les bains publics à changer d’usage, devenant davantage des piscines récréatives.
En 1993, le bain Turcot – devenu Saint-Michel en 1937 en référence au nom du quartier – ferme ses portes. Les usagers de la piscine sont dirigés au bassin du nouveau YMCA du Parc, récemment inauguré.
Le bain Saint-Michel est alors utilisé ponctuellement pour des événements culturels comme des pièces de théâtres, expositions, etc.
En 2011, des citoyennes et citoyens du quartier se mobilisent et demandent la réouverture du Bain Saint-Michel en bain public à des fins communautaires, sportives et de loisir. Leur demande ne se concrétise pas.
En 2014, la structure du bâtiment est jugée dangereuse et le bain ferme définitivement ses portes.
L’année suivante, la Ville de Montréal, conjointement avec le ministère de la Culture et des Communications, annonce un financement de 1,3 million de dollars pour la rénovation de l’enveloppe du bâtiment (maçonnerie, œil-de-bœuf) afin de pérenniser sa vocation de lieu de création et diffusion culturelle. Il est prévu que le bassin principal soit aménagé en salle de spectacle pouvant accueillir une centaine de personnes.
En 2016, d’importants dépassements de coûts (notamment sur la toiture et la maçonnerie) provoquent une interruption des travaux.
En 2018, les travaux nécessaires sont alors évalués à 4 millions. Les organismes souhaitant s’installer dans le Bain Saint-Michel sont sollicités afin de devenir « cogestionnaire » du projet et éventuellement du lieu. Il est estimé que les travaux seront complétés en 2019.
Finalement, entre 2016 et 2018, seuls des travaux urgents « pour sauver les meubles » ont été réalisés (selon Richard Ryan, conseiller de la Ville, district Mile-End).
En 2021, un nouveau financement de 8 millions est annoncé pour la complétion du projet afin d’accueillir le public dès le printemps 2022. Malheureusement, à l’été 2022, alors que seulement le tiers des travaux prévus ont été réalisés, la Ville de Montréal a résilié le contrat de l’entrepreneur. Des travaux de décontamination et de résolution d’infiltration d’eau ont retardé l’avancée des travaux d’aménagement.
La Ville de Montréal souhaite relancer le chantier en 2025 avec une nouvelle équipe d’architectes afin d’ouvrir les portes au public en 2026.
Dinu Bumbaru, directeur des politiques chez Héritage Montréal, « s’inquiète que les nouveaux délais dans la réalisation du projet de réaménagement de la Ville aient pour effet d’abîmer de façon durable ce bâtiment. “Le bâtiment risque d’y passer”, prévient-il. Il espère d’ailleurs que la Ville s’assurera que le bâtiment ne se dégrade pas en attendant la reprise des travaux. » Le Devoir, 11 août 2022.
Documentation
Énoncé de l’intérêt patrimonial, Ville de Montréal, 2015.
Le bain Saint-Michel, Mémoire du Mile-End, 2018.
L’épopée du bain Saint-Michel, Mario Girard, 18 mars 2021, La Presse.